Traiter les enfants infectés par le VIH par des anticorps monoclonaux largement neutralisants ?


Certains adultes infectés par le VIH-1 finissent par produire des « anticorps largement neutralisants » contre la protéine d’enveloppe du VIH-1 (« broadly neutralizing antibody » [bNAb]), qui limitent la réplication du virus malgré ses mutations. Les bNAbs monoclonaux pourraient être utiles pour traiter et prévenir l’infection par le VIH-1. Des essais sont en cours chez des enfants infectés (1).

Dans le cadre de la phase 1-2 de l’essai Tatelo mené au Bostwana, 25 enfants de 2 à 5 ans, infectés verticalement, ont été traités avec deux bNAbs monoclonaux, le VRC01LS et le 10-1074 (2).

Vingt-huit enfants étaient éligibles parce que leur charge virale plasmatique était indétectable depuis au moins 24 semaines, sous un traitement antirétroviral [TAR] débuté avant J7 et continué pendant ≥ 96 sem. Ils devaient recevoir le duo de bNAbs (en perfusion IV/4 sem.) avec le TAR pendant ≥ 8 sem., puis, si la charge virale restait indétectable, sans le TAR pendant 24 sem. au maximum. Une charge virale > 400 copies/ml au cours de la 2e phase signait l’échec de l’essai et indiquait la reprise du TAR.

Deux enfants n’ont pas débuté la 1ère phase et un la 2e phase à cause de rebonds de la charge virale.

Sur les 25 enfants restants, 14 (56 %) ont arrêté la 2e phase après 1 à 20 sem. (médiane : 4 sem.) et repris le TAR à cause d’une charge virale significative (médiane : 4,42 log10/ml). Sous TAR leur charge virale est redevenue indétectable.

Persistance de la suppression virale sans TAR pendant 6 mois chez 11 enfants

Onze enfants (44 %) sont allés au bout de la 2e phase avec une charge virale indétectable, sauf une fois (236 copies/ml). A la naissance, l’ADN VIH-1 total dans les cellules mononuclées du sang était plus bas que chez les enfants en échec. On trouve parmi eux les 8 enfants dont la recherche de provirus dans les cellules mononucléées du sang, par PCR ADN VIH-1 qualitative, et la sérologie, par méthode immuno-enzymatique, étaient toutes les deux négatives à l’entrée dans l’essai, ainsi que 5 des six enfants dont la phase 1 a duré 32 sem. pour préciser la pharmacocinétique et la tolérance.

Les études du pouvoir neutralisant des bNAbs sur les virus et de leur effet sur les réservoirs de virus sont parcellaires et difficiles à interpréter.

Les perfusions IV de bNAbs n’ont pas entraîné de réaction. L’évènement indésirable le plus grave a été une neutropénie chez un participant.

Les auteurs considèrent que ces résultats apportent une « preuve de concept » pour l’utilisation des bNAbs dans l’infection à VIH-1 de l’enfant, bien qu’en toute rigueur on ne puisse pas affirmer un lien entre les bNAbs et la persistance de la suppression virale sans TAR pendant 6 mois, observée chez 11 enfants. Les bNAbs permettraient d’économiser les médicaments antirétroviraux, et d’éviter les problèmes de compliance et de tolérance que posent ces médicaments. Pour augmenter leurs chances de succès, il faudra peut-être mieux sélectionner les candidats et utiliser des anticorps monoclonaux plus larges et plus puissants.

Dr Jean-Marc Retbi Source : AT


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