Lutte tous azimuts contre les addictions


Le Gouvernement a publié sa Stratégie Interministérielle de Mobilisation contre les Conduites Addictives pour la période 2023-2027. Celles-ci portent aussi bien sur les consommations d’alcool, tabac et drogues illicites que sur les addictions sans produits (jeux d’argent, etc). Elle est articulée autour de dix « orientations ».

1. Doter chacun de la liberté de choisir

L’objectif principal est le renforcement des compétences psychosociales, qui a fait la preuve de son efficacité pour prévenir les consommations à risque de substances psychoactives. Les actions seront en particulier adressées au milieu scolaire. Il s’agit également de fournir à la population « des informations précises et claires, basées sur des données scientifiques solides, sur les substances psychoactives ». La population prioritaire est constituée des adolescents et des jeunes adultes. L’accent sera mis sur les enjeux environnementaux des drogues (production, acheminement, conséquences économiques et sociales du trafic) et sur la responsabilité des usagers. Les changements de comportement seront favorisés par des opérations de marketing social (dont le Mois sans tabac constitue un bon exemple) et de « dénormalisation », pour montrer que les addictions ne sont pas la norme, y compris celles liées à l’alcool.

2. Renforcer le rôle-clef de la sphère familiale

Il s’agit principalement de renforcer la prévention des consommations de substances psychoactives par les parents (alcool et tabac en premier lieu), dont le rôle dans l’usage de leurs enfants est déterminant.

3. Assurer à chaque usager une prise en charge adaptée

Les besoins sont immenses. Ainsi, moins de 20% des personnes ayant un trouble de l’usage de substances bénéficient d’un traitement, qu’il s’agisse de fumeurs, des consommateurs problématiques d’alcool ou de drogues illicites. Seul un tiers des patients ayant un diagnostic de dépendance à l’alcool a demandé de l’aide à un médecin. En médecine de ville, 62% des médecins généralistes n’ont pas suivi de formation spécifique en addictologie et 55% d’entre eux ont du mal à parler d’alcool quand le sujet n’est pas l’objet de la consultation.

Parmi les mesures proposées, on note l’élaboration de référentiels de bonnes pratiques pour harmoniser celles-ci, l’augmentation du nombre des infirmiers de pratique avancée formés à l’addictologie et la prévention, le repérage et la prise en charge des conduites addictives pendant la grossesse.

4. Encadrer strictement la publicité et la vente des produits à risque

Partant du constat que « les dispositions législatives en vigueur ne sont pas adaptées à l’évolution des stratégies promotionnelles des opérateurs économiques », il faut organiser des dispositifs d’observation de ces stratégies afin d’identifier les infractions et d’envisager de nouvelles dispositions législatives. En particulier, le respect de l’interdiction de la vente aux mineurs (alcool, tabac, produits du vapotage, jeux d’argent) doit être renforcée.

5. Agir sur les prix

C’est un des leviers les plus efficaces pour réduire la demande. Par exemple, une augmentation d’1% du prix de l’alcool entraîne une baisse de la consommation comprise entre 0,3 et 0,5%. Dans ce sens, la mesure la plus efficace est de fixer un prix minimum de 0,5 € par verre standard plutôt que d’agir sur les taxes, avec en particulier deux avantages : le maintien des profits de la filière viticole et celui des recettes fiscales.

6. Réduire la disponibilité et l’accessibilité des produits stupéfiants

Il s’agit essentiellement des mesures nationales et internationales de lutte contre le trafic.

7. Favoriser des environnements sans produits psychoactifs

La France a adopté depuis longtemps plusieurs mesures en ce sens. Aujourd’hui, il faut accélérer le développement des espaces publics sans tabac, en particulier ceux fréquentés par des enfants.

8. Impliquer les différents milieux de vie

Il s’agit en particulier des entreprises, privées et publiques, des établissements d’enseignement supérieur et de formation, en favorisant notamment leur coordination.

9. Faire des fêtes et des grands événements des opportunités de mobilisation

Plusieurs mesures sont suggérées, comme proposer des boissons non alcoolisées moins chères que celles alcoolisées ou limiter l’exposition publicitaire et l’accessibilité des boissons alcoolisées pendant les grands événements sportifs.

10. Évaluer

Il s’agit d’abord de consolider les dispositifs d’observation de l’offre et de la demande de produits psychoactifs ainsi que des conduites addictives sans substance. Ces dispositifs sont bien développés en France, mais ils devraient permettre de réagir plus rapidement et plus efficacement en cas d’émergence de nouvelles drogues ou nouveaux usages.

L’évaluation couvre insuffisamment certains domaines, comme les prises en charge sanitaires et médicosociales des addictions ainsi que les réponses pénales à l’usage des produits psychoactifs. L’exemple des salles de consommations à moindre risque (les futures Haltes soins addictions) montre que cela est possible.

Par :

  • Serge Cannasse
  • Actualités professionnelles
  • 9 août 2023

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