Une étude canadienne révèle des taux d’observance du TAR sous-optimaux


Lorsqu’il est utilisé comme il se doit, le traitement du VIH (TAR) réduit la quantité de VIH dans le sang. Grâce à la prise continue de médicaments, la quantité de VIH devient minime ou inhibée au fil du temps chez la vaste majorité des personnes sous traitement. On qualifie couramment d’« indétectable » ce faible niveau de virus.  

En maintenant l’inhibition du VIH grâce à une bonne observance thérapeutique, on permet au système immunitaire de se réparer, et le risque d’infections liées au sida devient conséquemment extrêmement faible. Le TAR est tellement puissant que les scientifiques prévoient une espérance de vie quasi normale pour de nombreuses personnes suivant ce genre de traitement.

Certaines personnes séropositives font toutefois face à de nombreux problèmes, notamment des périodes d’anxiété et de dépression, de dépendance, d’insécurité alimentaire, de violence et d’itinérance. En raison de ces facteurs et d’autres, une personne peut avoir de la difficulté à suivre fidèlement son traitement et à maintenir une charge virale inhibée.

Une équipe de recherche canadienne a examiné des bases de données se rapportant à l’exécution et au renouvellement d’ordonnances pour le TAR chez plus de 19 000 personnes vivant avec le VIH. L’analyse de ce genre de données, une méthode validée depuis deux décennies par des scientifiques de la Colombie-Britannique, permet d’estimer grosso modo les taux d’observance du TAR.

L’équipe responsable de cette étude canadienne a constaté que 45 % des personnes sous TAR ne renouvelaient pas leurs ordonnances aux dates prévues (causant ainsi des interruptions de leur approvisionnement en médicaments) et vivaient donc des périodes où elles ne prenaient pas leur traitement.

Une analyse statistique a révélé que les personnes faisant preuve d’une observance sous-optimale étaient généralement plus jeunes et plus susceptibles de suivre un schéma thérapeutique nécessitant plusieurs prises de comprimés par jour.

Il est probable que cette analyse de données se rapportant au renouvellement d’ordonnances relève d’une méthode imparfaite. Cependant, les résultats révélant une observance sous-optimale chez certains sous-groupes de personnes sont sans doute fiables et font écho aux données d’autres études. Notons à ce propos que des études menées antérieurement dans d’autres pays ont révélé que les jeunes étaient plus susceptibles de connaître des problèmes d’observance que les personnes plus âgées. Par ailleurs, des études menées aux États-Unis ont permis de constater que les personnes suivant un schéma thérapeutique comportant la prise d’un seul comprimé par jour faisaient preuve d’une meilleure observance thérapeutique que les personnes dont le traitement exigeait la prise de plusieurs comprimés.

La non-observance peut entraîner de nombreuses conséquences, notamment l’échec du traitement, l’apparition de souches virales multirésistantes, le déclin de la santé et, dans certains cas, une réduction de l’espérance de vie. Même si l’étude canadienne ne traite pas de ces conséquences éventuelles, elle soulève la nécessité d’études sur les facteurs à l’origine de la non-observance et d’interventions susceptibles d’aider les gens à se remettre dans la bonne voie par rapport à la prise des médicaments. Si les patient·e·s ne reçoivent pas de soutien à l’observance, les bienfaits du TAR quant à la prolongation de la vie ne pourront être connus de tous et de toutes de manière équitable.

En ce qui concerne la non-observance, les données canadiennes font écho à une étude menée auprès de plus de 200 000 personnes séropositives aux États-Unis. Lors de celle-ci, l’équipe de recherche a constaté des taux de non-observance plus élevés que prévus. Des détails concernant cette étude américaine se trouvent plus loin dans ce bulletin de Nouvelles CATIE.

Détails de l’étude

L’équipe de recherche canadienne s’est concentrée sur plusieurs bases de données, dont les suivantes :

  • Système national d’information sur l’utilisation des médicaments prescrits (SNIUMP); (système en vigueur dans plusieurs provinces)
  • Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ); (Québec seulement)
  • Pharmaceutical Information Network (PIN); (Alberta seulement)

L’équipe a recueilli des données sur l’utilisation du TAR et le renouvellement d’ordonnances dans les provinces suivantes :

  • Alberta
  • Saskatchewan
  • Manitoba
  • Ontario
  • Québec
  • Nouveau-Brunswick
  • Terre-Neuve-et-Labrador

Se fondant sur des bases de données de pharmacies, l’équipe de recherche a pu estimer le nombre de jours où les participant·e·s ne disposaient pas de médicaments du TAR (elle classait ceux-ci comme des jours de non-observance). Plus le nombre de jours sans TAR était élevé, plus le degré de non-observance attribué aux participant·e·s augmentait.

Tou·te·s les participant·e·s étaient des adultes, dont une majorité d’hommes (74 %). La plupart avaient entre 35 et 64 ans, et 25 % de la cohorte avaient moins de 35 ans.

Outre le TAR, nombre de participant·e·s prenaient des médicaments prescrits pour les problèmes suivants :

  • dépression
  • problèmes de sommeil
  • hypertension
  • anomalies lipidiques dans le sang

L’équipe de recherche a analysé des données recueillies entre 2010 et 2020.

Résultats

L’équipe de recherche a déterminé que 55 % des participant·e·s renouvelaient leurs ordonnances en temps opportun. Ces personnes se faisaient attribuer un taux d’observance de 95 % ou plus.

L’équipe a réparti le reste des participant·e·s selon leur taux d’observance estimé, comme suit :

  • 90 % à 94 % : 20 % des participant·e·s
  • 85 % à 89 % : 10 %
  • 80 % à 84 % : 6 %
  • 60 % à 79 % : 8 %
  • 40 % à 59 % : 1 %

Facteurs liés à la non-observance

Une analyse statistique a révélé que, dans l’ensemble, les personnes qui ne renouvelaient pas leurs ordonnances en temps opportun avaient tendance à être plus jeunes et/ou à suivre un schéma thérapeutique comportant plusieurs comprimés.

Lors d’une analyse portant spécifiquement sur trois provinces (Alberta, Saskatchewan et Manitoba) dont les bases de données contenaient beaucoup de détails sur l’usage de médicaments non liés au VIH, l’équipe de recherche a constaté que l’observance avait tendance à être sous-optimale chez les personnes auxquelles on prescrivait des médicaments pour les maladies suivantes :

  • trouble lié à l’utilisation d’une substance
  • hypercholestérolémie
  • diabète

D’autres analyses de données provenant de ces provinces ont indiqué que les facteurs suivants étaient également liés à l’observance sous-optimale du TAR :

  • sexe féminin
  • âge plus jeune
  • présence d’autres problèmes de santé (comorbidités)

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