Les infections sexuellement transmissibles sont le type de rencontres estivales dont on se passerait volontiers. Quelques rappels sur l’éventail des moyens de réduire les risques pour passer des vacances tranquilles.
Il n’y a pas une sexualité, il y a des sexualités, un intime partagé par chacun·e de nous, chacun·e à sa manière. Retrouvez chaque semaine la newsletter Intimité·s, un rendez-vous pour tous les âges, tous les genres, toutes les orientations sexuelles. Une remarque, une question, écrivez-nous à intimites@slate.fr.
Comment choisissez-vous un maillot de bain? Vraisemblablement en fonction de différents paramètres qui vous sont propres: une forme qui épouse joliment votre corps, une couleur qui vous plaît, sa capacité à résister ou non au chlore, sa tenue si vous avez l’intention de nager ou de surfer avec, etc. Ce mix entre esthétique, technique et confort fait que ce maillot, même s’il n’est pas parfait, est celui qui vous convient le mieux –et peu importe ce qu’en pensent les autres. Eh bien, pour ce qui est de réduire le risque d’infections sexuellement transmissibles (IST), c’est un peu pareil.
«En matière de réduction des risques d’IST, il n’y a pas de solution universelle. Il s’agit de faire le choix de ce qui est le mieux pour soi, sans que cela touche négativement les autres», expose Tim Madesclaire, accompagnateur en santé sexuelle au Spot Beaumarchais de l’association AIDES. «Il importe d’être informé de l’existence de toutes sortes de méthodes qui permettent de réduire les risques afin de déterminer celles qui conviennent le mieux aux besoins de la personne», renchérit Élie Bouët-Jacqueline, membre du bureau du Planning familial. En effet, il est loin le temps où le préservatif externe (dit aussi préservatif masculin), qui reste très efficace contre la plupart des IST, était la seule option.
Alors, si l’important est d’être renseigné, quelles sont les informations à savoir impérativement, particulièrement avant l’été, période propice aux rencontres?
La première chose à dire est que, peu importe son âge, son genre et son orientation sexuelle, tout le monde est concerné par les IST. S’il en existe une trentaine, les plus répandues en France sont:
- Pour les infections bactériennes: la syphilis, la gonorrhée, la chlamydiose et l’infection à mycoplasmes;
- Pour les infections virales: l’hépatite B, l’herpès génital, le VIH, le papillomavirus humain (HPV) et le Mpox (Monkeypox, auparavant appelée «variole du singe»);
- Pour les infections parasitaires: la trichomonase.
Pénétration anale et/ou vaginale, cunnilingus, anulingus, caresse sexuelle, baiser, contact peau à peau ou muqueuse à muqueuse: chacune des pratiques sexuelles a son propre mode de transmission.
L’incontournable dépistage
On l’oublie parfois mais, comme l’ont souligné d’emblée de jeu Tim Madesclaire et Élie Bouët-Jacqueline avec lesquels j’ai échangé pour préparer cet article, le premier outil de réduction des risques en matière d’IST est le dépistage. En effet, de nombreuses IST ne provoquent pas d’emblée de symptômes. Et pour autant, cela ne veut pas dire qu’elles ne font pas silencieusement des dégâts, notamment sur la fertilité, et qu’elles ne se transmettent pas. Alors le dépistage permet à la fois de prendre soin de soi en bénéficiant d’un traitement et/ou d’un surveillance le plus tôt possible et de prendre soin de ses partenaires en coupant les chaînes de contamination.
L’idée est donc, à partir du moment où vous avez une sexualité en dehors du schéma du couple exclusif (véritablement fidèle/exclusif), de se faire dépister régulièrement en trouvant un rythme qui correspond à ce qui est possible pour vous et à votre sexualité.
Un tampon capable de dépister les IST? Oui, ça existe
Cela peut être par exemple tous les six mois si vous avez peu de partenaires, tous les trois mois si vous êtes davantage actif ou encore tous les cinq ou dix partenaires. Sinon, il y a aussi des moments clés où le dépistage est le bienvenu:
- Avant d’arrêter le préservatif avec un nouveau partenaire et dans le cas où cette relation est monoamoureuse;
- Dès que vous avez un doute;
- Après un rapport non protégé;
- Si votre partenaire ou ex-partenaire est porteur d’une IST.
Le dépistage, qui se fait, selon l’IST, soit par prélèvement local soit par prise de sang, peut être effectué:
- En laboratoire de biologie médicale (sur ordonnance d’un médecin ou d’une sage-femme, sauf pour le VIH pour lequel il n’y a pas besoin d’ordonnance pour que le test soit pris en charge);
- Dans les centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic (CeGIDD);
- Dans les centres de santé sexuelle;
- Dans les centres de protection maternelle et infantile (PMI);
- Ou encore dans certaines antennes d’associations de lutte contre le VIH.
Sur le site QuestionSexualité, vous trouverez un annuaire qui regroupe les différents lieux de dépistage et leurs spécificités. Notez qu’un dépistage régulier ne dispense pas d’une autosurveillance: en cas de douleurs, de plaques ou de boutons, il faut consulter un médecin.
Alors bien sûr en cas de résultats positifs, il est préférable, dans la mesure du possible, de prévenir son/sa/ses partenaires. «La plupart des IST se traitent, il ne faut pas en faire un drame et surtout ne pas se sentir coupable», rassure Tim Madesclaire, qui rappelle que la notification des partenaires n’est jamais obligatoire et d’autant plus qu’elle peut, dans certains cas, mettre la personne en danger. Une option peut-être d’utiliser une application comme celle développée par le Spot ou celle de la Société française de lutte contre le sida (SFLS).
Pas un, mais des préservatifs
Un point maintenant sur les outils de prévention. A priori, vous connaissez le préservatif externe. Mais connaissez-vous le préservatif interne (aussi appelé «préservatif féminin»)? Celui-ci peut être utilisé aussi bien pour des rapports vaginaux qu’anaux et est tout aussi efficace pour se prémunir contre les IST. En effet, comme il tapisse entièrement la paroi vaginale ou anale, il n’y a pas de contact entre le sperme et les muqueuses, ni entre les muqueuses.
Comme il est fabriqué en polyuréthane ou en nitrile, il convient particulièrement aux personnes allergiques au latex. Il est plus solide. Dernier avantage, il peut se mettre en place jusqu’à huit heures avant le rapport. Évidemment, il s’agit d’observer les mêmes précautions que pour le préservatif externe: ne pas le plier ou l’écraser, le protéger de la chaleur, vérifier la date de péremption.
Il faut aussi rappeler l’existence de la digue dentaire qui est un carré de latex utilisé lors des rapports oro-buccaux, tels que le cunnilingus ou l’anulingus. Il se place sur la vulve ou sur l’anus et doit être maintenu lors du rapport.
Tout le monde peut prendre la PrEP
Il faut aussi parler de la PrEP qui, contrairement à ce que l’on pense parfois, n’est pas réservée aux hommes qui ont du sexe avec d’autres hommes. «Dès lors que l’on est multipartenaire, peu importe le genre et l’orientation sexuelle, la PrEP se justifie», insiste Tim Madesclaire. Cette prophylaxie pré-exposition est un outil de prévention à destination des personnes séronégatives pour se prémunir contre une infection au VIH. Il s’agit d’un traitement antirétroviral parfaitement sûr et efficace. Elle peut être prise durant une courte période, par exemple pendant vos vacances ou sur le long terme.
Depuis 2021, elle peut être prescrite par tout médecin, généraliste ou spécialiste, ainsi qu’en CeGIDD. Attention, la PrEP ne protège pas des autres IST, que du VIH, mais sa prescription impose un suivi médical renforcé et des dépistages réguliers, ce qui en fait plus largement un très bon outil de réduction des risques en matière d’IST. En outre, elle n’est évidemment pas incompatible avec le port du préservatif.
Pourquoi les femmes prennent-elles aussi peu la PrEP?
Et en cas d’oubli?
Nul n’est parfait et il peut arriver d’oublier d’adopter un moyen de prévention. Dans ce cas, ou en cas d’exposition probable au VIH –rappelons qu’une personne qui vit avec le VIH et qui prend correctement son traitement ne peut pas transmettre le virus–, il faut penser au traitement post-exposition (TPE). Celui-ci a pour but de diminuer le risque d’infection par le VIH. Il doit être pris le plus rapidement possible, c’est-à-dire idéalement quatre heures après l’exposition à un risque et au plus tard dans les quarante-huit heures. Le TPE devra ensuite être suivi durant quatre semaines, sans interruption.
Ce traitement peut vous être prescrit dans les centres de dépistage (CeGIDD), les services des maladies infectieuses durant les heures ouvrables ou dans les services d’urgences en dehors des heures ouvrables. Vous devrez ensuite vous soumettre à une surveillance sérologique destinée à s’assurer de l’absence d’infection au VIH. Il faudra également effectuer un dépistage des autres IST.
Il est très difficile d’être exhaustif en matière de réduction des risques face aux IST, tant chacun est unique dans son rapport à la sexualité et à la prévention. Alors, si vous avez des questions et afin de vous aider à trouver les solutions qui vous sont propres, je ne peux que vous encourager à prendre conseil auprès d’un CeGIDD ou du Planning familial. «Notre but est de tenir conseil, d’écouter la personne, de réfléchir avec elle, pour l’orienter au mieux et lui donner des informations fiables», souligne Élie Bouët-Jacqueline.