Étude sur les préférences des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes en matière de prophylaxie pré-exposition au VIH (PrEP)


La prophylaxie pré-exposition au VIH (PrEP) sous forme orale consiste en deux médicaments (ténofovir + FTC) qui se vendent sous les noms de Descovy et de Truvada. Ce dernier est également offert en versions génériques. Lors des essais cliniques, la PrEP orale quotidienne s’est révélée très efficace lorsqu’elle était utilisée comme il se devait, faisant baisser le risque d’infection par le VIH de plus de 99 %. La PrEP orale doit commencer avant que toute activité sexuelle à risque ait lieu. Or, certaines personnes ne peuvent prévoir leurs activités sexuelles avec certitude ou ont de la difficulté à prendre des comprimés.

Une nouvelle option sous forme injectable à longue durée d’action sera bientôt disponible au Canada pour la prévention du VIH. Cette formulation repose sur le médicament cabotégravir, lequel est injecté profondément dans le fessier tous les deux mois (après une courte période d’induction). Dans le cadre d’essais cliniques, la PrEP injectable à longue durée d’action s’est révélée très efficace, voire plus efficace que la PrEP orale quotidienne sur le plan statistique. Il est probable que cette supériorité statistique est attribuable au fait que la plupart des personnes sous PrEP injectable ont éprouvé moins de problèmes d’observance thérapeutique que les personnes sous PrEP orale.

Outre le cabotégravir à longue durée d’action (cab LDA), des compagnies pharmaceutiques mettent actuellement au point d’autres formulations de médicaments à longue durée d’action destinées à la PrEP. Le lénacapavir (Sunlenca) en est un exemple. Ce dernier est injecté tous les six mois. Il est donc probable que la PrEP à longue durée d’action deviendra une option importante pour de nombreuses personnes séronégatives qui souhaitent réduire leur risque de contracter le VIH.

En 2020, des équipes de recherche de plusieurs universités américaines ont collaboré à la création d’un questionnaire destiné aux hommes participant à l’étude AMIS (American Men’s Internet Survey). Tous les participants à l’AMIS étaient des hommes gais, bisexuels ou d’autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (hommes gbHARSAH). Les équipes ont choisi un sous-groupe pour participer à un sondage sur la PrEP; il s’agissait de 2 506 hommes séronégatifs qui avaient eu une relation sexuelle orale ou anale avec un autre homme dans les 12 mois précédents. Selon les équipes de recherche, les participants mettaient moins de 12 minutes à remplir le questionnaire.

Au moment où le sondage a eu lieu, la PrEP injectable à longue durée d’action n’était pas encore approuvée aux États-Unis.

Voici un bref profil moyen des participants qui ont rempli le questionnaire :

  • groupes d’âge : 15 à 39 ans – 78 %; 40 ans ou plus – 22 %
  • principaux groupes ethnoraciaux : Blancs – 78 %; Noirs – 10 %; Asiatiques – 3 %
  • accès à une assurance médicaments privée : 69 %
  • 72 % des hommes disaient avoir eu des relations sexuelles sans condom avec d’autres hommes au cours des 12 mois précédents
  • 83 % disaient n’avoir jamais utilisé la PrEP

Résultats saillants

La plupart des hommes, soit 2 074 ou 83 % d’entre eux, ont dévoilé n’avoir jamais utilisé la PrEP orale. Cependant, 53 % d’entre eux (1 332) se disaient disposés à s’en servir.

Comme nous l’avons mentionné, la PrEP injectable à longue durée d’action n’était pas encore approuvée aux États-Unis au moment où ce sondage a eu lieu. Soixante pour cent des hommes (1 500) ont néanmoins affirmé qu’ils seraient prêts à y avoir recours.

Lorsqu’on les a interrogés au sujet de leur préférence, soit la PrEP injectable à longue durée d’action, la PrEP orale quotidienne ou aucune PrEP, les participants ont répondu ainsi :

  • PrEP à longue durée d’action : 74 %
  • PrEP orale quotidienne : 15 %
  • aucune PrEP : la plupart des autres

Parmi les hommes les moins susceptibles de choisir la PrEP injectable à longue durée d’action, il y en avait qui présentaient les caractéristiques suivantes :

  • hommes noirs, autochtones ou de couleur
  • hommes sans assurance médicaments privée
  • hommes n’ayant jamais utilisé la PrEP orale quotidienne
  • hommes n’ayant qu’un seul partenaire sexuel masculin

Parmi les hommes qui préféraient la PrEP à longue durée d’action, on en trouvait qui avaient les caractéristiques suivantes :

  • 40 ans ou moins
  • éducation postsecondaire
  • utilisation antérieure de la PrEP orale quotidienne
  • deux partenaires sexuels ou davantage

Temps

Pour suivre la PrEP, il faut passer des examens médicaux réguliers, ainsi que des tests de dépistage du VIH et d’autres infections transmissibles sexuellement (ITS). Pour ce faire, il faut se rendre régulièrement à une clinique ou à un laboratoire, ce qui prend du temps. Lorsque les équipes de recherche ont interrogé les participants sur le temps qu’ils étaient prêts à consacrer à des consultations régulières en lien avec la PrEP (dépistages du VIH, déplacements pour assister aux rendez-vous, temps d’attente), ils ont répondu jusqu’à deux heures et trouvaient que trois heures étaient excessives.

Manque d’intérêt pour la PrEP à longue durée d’action

Selon les équipes de recherche, les raisons pour lesquelles certains hommes ne s’intéressaient pas à la PrEP incluraient les suivantes :

  • Ils se croyaient à l’abri du risque de contracter le VIH ou considéraient leur risque comme faible;
  • Ils utilisaient systématiquement des condoms;
  • Ils n’avaient pas d’assurance médicaments privée.

Notons qu’aux États-Unis, le prix courant de la PrEP injectable à longue durée d’action est fixé à un minimum de 22 000 $ par année.

Sujets à explorer

Aux États-Unis, les hommes gbHARSAH racisés portent un fardeau disproportionné à l’égard du VIH. Selon les équipes de recherche, les programmes de PrEP « devraient viser à cerner et à surmonter les obstacles auxquels les hommes gbHARSAH des minorités font face […] ». Elles encouragent d’autres équipes de recherche à concevoir et à lancer des études pour explorer les enjeux et les obstacles éventuels à l’accès à la PrEP auxquels se heurtent les groupes minoritaires, y compris les personnes trans. De telles études prendront de l’importance dans les années à venir au fur et à mesure que le déploiement de la PrEP à longue durée d’action se poursuivra.

Un autre domaine d’étude proposé par les équipes de recherche se rapporte au déploiement de la PrEP à longue durée d’action par les cliniques et les systèmes de santé. Rappelons que les injections nécessaires à cette forme de PrEP doivent être effectuées par des professionnel·le·s de la santé. Or, comme certaines cliniques n’ont pas de personnel formé à cette tâche, cela pourrait devenir un obstacle à l’usage de la PrEP à longue durée d’action. Les équipes de recherche encouragent également les systèmes de santé à trouver des subventions pour couvrir cette forme de PrEP, sinon le coût sera trop élevé pour la plupart des usagers potentiels.

Même si la PrEP à longue durée d’action élimine la nécessité de doses orales quotidiennes, elle exige encore l’assiduité aux rendez-vous au laboratoire et en clinique pour passer des dépistages et recevoir les injections. Des études sont nécessaires pour évaluer l’observance en cette matière.

Rappelons que cette étude avait lieu aux États-Unis. Au Canada, il est probable que le déploiement de la PrEP à longue durée d’action devra être surveillé et amélioré. Certaines cliniques auront peut-être besoin d’aide sur le plan du personnel si leur clientèle compte de nombreux utilisateurs de la PrEP injectable à longue durée d’action.

—Sean R. Hosein


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