Des «capsules temporelles» pour ne pas oublier les personnes disparues ou vivant avec le VIH-sida


Même s’il y a de multiples congrès sur le VIH-sida, qu’il y a à Montréal et ailleurs dans la province des cliniques spécialisées en traitements du VIH-sida et que de nombreux livres ont été écrits à ce sujet, entre autres, les nouvelles générations ne sont pas nécessairement au courant de cette épidémie qui a fait des ravages dans les années 1980-1990. Avec pour objectif de ne pas oublier ce passé et cette vague de décès d’hommes gais, principalement, Denis Cormier-Piché en collaboration avec les Archives gaies du Québec (AGQ) relance le projet de «Capsules temporelles VIH-sida : récits longtemps tus». Les gens séropositifs ou leur entourage pourront ainsi témoigner et ces récits seront conservés pour 25 ans, soit jusqu’à l’ouverture de ces «capsules temporelles».

On vous en avait déjà parlé en janvier alors qu’on avait lancé presque confidentiellement ce projet-là. Mais voici que grâce au programme «Nouveaux horizons pour les aînés» du gouvernement fédéral, «on peut relancer ce projet de capsules temporelles de manière plus soutenue», de dire Pierre Pillotte, le coordonnateur des AGQ. «L’idée m’est venue d’une affiche au parc de l’Espoir durant la 24e conférence internationale du Sida, qui se tenait à Montréal, en juillet 2022, explique Denis-Cormier Piché, qui est gouverneur de la Fondation Émergence depuis 2016. Il y a plein d’histoires privées de gens qui ont vécu la période du sida, qui ne l’ont jamais révélé ou des gens de l’entourage de personnes qui en sont décédées. Tous ces gens peuvent ainsi témoigner. […]»

Mais pourquoi cette prescription de 25 ans, pourquoi attendre jusqu’à 2047 pour dépouiller ces capsules-là ? « Par pudeur, par respect, parce que certains ne l’ont jamais dit à leur famille, à leurs parents, etc. C’est pour libérer la parole, simplement. Il n’y a pas ici de questions légales ou techniques, juste pour libérer la parole, que les gens témoignent et je sais qu’il va y en avoir tellement. Parce que cela peut être aussi émouvant pour une personne de le faire. […] C’est un devoir de mémoire, pour ce pas oublier ces personnes-là. Ce sera très touchant, c’est sûr », poursuit Denis Cormier-Piché qui intervient aussi sur différents projets en lien avec les réalités 2SLGBTQ+ à l’UdeM, Concordia, l’Université Laval, l’INRS et à l’INESS/Table de santé numérique.

Et qui pourra ainsi avoir accès à de tels documents ? «Tout le monde pourra y avoir accès, le public en général qui s’intéresse à cette question, des médecins, des étudiants, des chercheurs, des auteurs aussi peut-être, etc., souligne Denis Cormier-Piché. On veut que ce soit disponible à un public le plus large que possible à ce moment-là.» Comment ce projet-là peut-il intéresser particulièrement les Archives gaies du Québec ? «Nous avons trouvé que c’était un bon projet parce qu’il rentre dans notre mandat de récolter des archives sur le passé des communautés LGBTQ+. Nous appuyons totalement Denis Cormier-Piché dans ses démarches pour faire connaître ces capsules temporelles et faire participer les gens pour ce devoir de mémoire», indique pour sa part Pierre Pilotte.

«Je remercie les Archives de m’avoir choisi pour travailler sur cette initiative», dit Denis Cormier-Piché qui avait proposé ces capsules l’an dernier et qui a planifier les diverses étapes. Pour participer, la formule est très simple, en fait c’est tout ce qui peut rentrer dans une enveloppe No 10 (9,5 pouces/24cm x 4,25 pouces/10,5cm), c’est-à-dire des poèmes, des textes, des dessins, photos, images, ou clé USB (support numérique, vidéo, etc.). «Cette idée m’est venue du ministère de la Justice, alors que dans un procès, on peut présenter quelque chose à la cour, on va alors ouvrir une telle enveloppe pour y lire son contenu. En même temps, tout le monde peut utiliser une telle enveloppe, donc ce n’est pas compliqué», rajoute Denis Cormier-Piché. Pour l’envoie, tout est inscrit sur le site web des AGQ.

Dans le cadre de Fierté Montréal, au mois d’aout prochain, les Archives proposeront quatre soirs de projections au parc de l’Espoir (au coin de Panet et Sainte-Catherine). Grâce à une subvention du Patrimoine montréalais, on projettera essentiellement trois sujets : les manifestations d’Act Up Montréal, des affiches de prévention du VIH-sida ainsi que des citations. «Lors de ces soirées, deux personnes des AGQ seront sur places pour distribuer également du matériel sur les capsules temporelles et encourageront les gens à y participer, rajoute Pierre Pilotte. Ce matériel sera également offert lors de la Journée communautaire de Fierté Montréal, au kiosque des Archives, le samedi 10 aout.»

Mais tout cela est conditionnel en prenant pour acquis que les Archives gaies du Québec existeront encore dans un quart de siècle, pour l’ouverture de ces enveloppes, sinon qu’arrivera-t-il ? «On pourra potentiellement les léguer à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) qui en prendront possession et n’importe qui pourra y avoir accès dans 25 ans si les AGQ ne seront plus là […]», croit Denis Cormier-Piché. Éventuellement, d’autres activités reliées à ce projet seront dévoilées, il faudra surveiller les détails sur le site web des AGQ. 

INFOS | Si vous décidez de participer à ce projet, on vous remettra un formulaire d’information et de consentement. Tous les détails sont à l’adresse suivante : http://agq.qc.ca/capsules-temporelles-vih-sida/


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