Australie: En 10 ans, le TasP et la PrEP ont réduit de 66% les infections VIH chez les hommes gays et bisexuels


En Australie, l’efficacité du traitement comme prévention (TasP) chez les hommes gays et bisexuels vivant avec le VIH, renforcée par l’apparition de la PrEP en 2016, est corrélée à une baisse des deux tiers du nombre de nouvelles infections entre 2010 et 2019.

On sait que les personnes séropositives ne transmettent pas le VIH quand leur charge virale est supprimée par un traitement antirétroviral efficace. Mais on a encore peu de chiffres sur l’impact de ce mode de prévention du VIH au niveau populationnel. Les résultats de l’étude australienne, publiée dans The Lancet HIV, démontrent qu’entre 2010 et 2019, une augmentation de 27% du nombre d’hommes gays et bisexuels ayant une charge virale indétectable en Australie a entraîné une réduction de 66% des infections par le VIH.

L’étude observationnelle menée par le Dr Denton Callendar de l’Université de Nouvelle-Galles du Sud, montre aussi que l’introduction de la prophylaxie pré-exposition (PrEP), auprès  des personnes séronégatives donc, a renforcé la corrélation entre le nombre croissant de personnes séropositives indétectables et la réduction de la transmission du VIH. Sur la période, chaque augmentation de 1% de la prévalence de la suppression de la charge virale correspondait ainsi à une réduction de 20% de l’incidence du VIH. Pour les auteurs, ces résultats éclairent la très grande efficacité du traitement comme prévention (TasP, Treatment as Prevention), en matière de santé publique. 

L’étude a évalué l’impact de l’augmentation de la couverture du traitement antirétroviral et de la fourniture de PrEP sur la transmission du VIH dans les États de Nouvelle-Galles du Sud et de Victoria, sur dix ans. Les auteurs ont étudié le changement de statut sérologique, l’accès et les prises des traitements, la suppression de la charge virale et l’utilisation de la PrEP chez 101 772 hommes gays et bisexuels, séronégatifs et séropositifs, recevant des services de santé dans 69 cliniques des deux États australiens.   

La cohorte comprenait à l’inclusion 12 554 hommes vivant avec le VIH ou ayant été testés séropositifs au cours de la période de suivi. L’analyse principale a calculé la prévalence de la suppression virale dans cette population et l’a prise en compte dans l’analyse multivariée des facteurs associés à l’incidence du VIH. La proportion d’hommes vivant avec le VIH et ayant une suppression virale est passée de 69% en 2010 à 88% en 2019, soit une augmentation de 27%.

Prévalence dans la population de la suppression virale, de l’incidence du VIH, du VIH non diagnostiqué et de l’adoption de la PrEP chez les hommes gays, bisexuels et ayant des rapports sexuels avec des hommes, par an, 2010-2019.

Parallèlement, l’analyse principale a examiné l’incidence du VIH chez les hommes ayant effectué au moins deux tests au cours de la période de suivi, et qui étaient séronégatifs après le premier. Sur 59 234 hommes, 1201 ont été testés séropositifs au VIH pendant le suivi, soit une incidence de 0,4 cas pour 100 années-personnes de suivi. Les résultats montrent une baisse de presque deux tiers de l’incidence du VIH, passant de 0,64 à 0,22 cas pour 100 personnes par année. La baisse la plus importante a été constatée chez les hommes âgés de 30 à 39 ans (- 88%). 

Le nombre d’individus infectés, mais non diagnostiqués, a également baissé pendant la durée de l’étude. Le pourcentage de personnes non diagnostiquées est passé de près de 11% en 2010 à 9% en 2019. La proportion des infections non diagnostiquées parmi les hommes gay et bisexuels a été estimée à l’aide d’un modèle mathématique de rétroprojection. L’outil de modélisation utilisé, celui du Centre européen de contrôle des maladies (ECDC), prend en compte le nombre de lymphocytes CD4 au moment du diagnostic, les diagnostics de sida, le nombre de décès et le taux d’émigration des personnes vivant avec le VIH pour estimer le nombre d’infection au VIH non diagnostiquée1.

L’impact de la PrEP

La PrEP a été autorisée en Australie pendant la durée de l’étude, en 2016, et le nombre d’utilisateurs de PrEP est passé de 17% en 2016 à 36% en 2019 chez les hommes homos et bisexuels. Chez les hommes utilisant la PrEP, l’incidence du VIH était de 70% inférieure par rapport à celle des non-utilisateurs.

L’incidence du VIH a diminué de manière plus marquée entre 2015 et 2017, et s’est stabilisée par la suite, ce qui témoigne de l’efficacité de la PrEP associée à une baisse du nombre de personnes non diagnostiquées et donc possiblement transmetteuses du virus.

Cette étude met ainsi en évidence l’importance de la prévention combinée pour réussir à faire baisser le nombre de nouvelles contaminations. C’est cette combinaison de l’effet préventif du traitement antirétroviral, de la PrEP pour les personnes séronégatives et de la sensibilisation au dépistage précoce du VIH qui a conduit à une réduction significative de l’incidence du VIH dans la population HSH en Australie entre 2010 et 2019.

Enfin, les chiffres rapportés par l’étude sont d’autant plus notables qu’il ne s’agit pas d’une expérimentation, mais d’une étude de cohorte longitudinale basée sur des données de routine, qui confirme l’efficacité d’une implémentation grandeur nature de la prévention combinée en vie réelle.

Dans leur conclusion, les auteurs soulignent l’importance de l’augmentation du recours au dépistage, de l’accès aux traitements et du contrôle de la charge virale chez le plus grand nombre de personnes possibles. Des progrès qui reflètent en grande partie les efforts des cliniques et des organisations communautaires locales pour rendre les services plus accessibles, ainsi que l’importance et l’efficacité des campagnes de prévention ciblées.

Charles Roncier VIH ORG


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